Faire germer les graines : comment faire ? (2ème partie)

Les graines difficiles à germer : les méthodes à utiliser

>> Avez-vous regardé la vidéo sur réussir les semis ici ? <<

Faire germer les graines n’est habituellement pas sorcier. Il faut néanmoins suivre quelques règles de base. Dans la première partie de cet article, nous avons abordé la méthode de germination simple et générique, celle qui fonctionne dans la plupart des cas.

Dans cette deuxième partie, nous allons passer en revue les méthodes plus sophistiquées de germination des graines. leIl s’agit de provoquer le « réveil » des graines afin d’obtenir une germination optimale – ou une germination tout court pour les graines « difficiles ». Nous aborderons :

  • La stratification à froid des graines, en extérieur et en bac, en extérieur et en boîte enterrée
  • La stratification à froid dans votre réfrigérateur
  • La scarification de la graine sans endommager le hile
  • La scarification individuelle (Graine par graine), la scarification « collective » au papier verre. La scarification a-t-elle été faite correctement ? Trempage et test final
  • Faire germer en exposant à la lumière
  • Le traitement par le feu pour faire germer
  • La germination par la chaleur

Nos fiches détaillées de culture pour chacune des plantes vous fourniront les informations nécessaires pour savoir quelle méthode choisir.


Faire germer par la stratification à froid

Wikipedia nous explique qu’en botanique, la stratification est « l’opération qui consiste à lever la dormance » de la graine.

Pour faire germer les graines de certaines espèces, il faut des hivers froids et longs. Germer au mauvais moment, à l’automne par exemple, serait évidemment fatal pour la plantule qui n’aurait pas assez de force pour encaisser la rudesse de l’hiver. Donc pour ces graines là, pas de période marquée de froid entraîne une germination timide voire inexistante.

Faire germer les graines - Stratification à froid

La graine doit d’abord s’imbiber d’eau, donc il faudra la placer dans un milieu humide. Les variations de températures vont ensuite créer sur la graine humide un phénomène d’expansion et contraction qui contribue au réveil. Le passage de l’eau lave aussi certaines substances qui inhibe la germination.

L’échinacée angustifolia par exemple est native des états centraux des Etats-Unis. Les hivers du Dakota, Kansas et Nebraska sont longs et froids. D’une manière générale, pour faire germer les graines de toutes les échinacées, il faudra prévoir une période de stratification à froid.

Voici comment vous pouvez reproduire, chez vous, cette période de froid tant attendue par la graine.

La stratification à froid en extérieur et en bac

Vivez-vous dans un endroit où l’hiver vous amène au moins 4 à 6 semaines de froid, avec une quinzaine de jours de températures en dessous de 0°C (pas forcément consécutifs)? Si oui, vous pouvez suivre cette méthode pour faire germer les graines qui ont besoin d’une période de stratification à froid.

J’habite en Provence, une zone chaude l’été, mais assez froide l’hiver pour facilement accomplir la stratification en extérieur. Vous voyez, vous n’avez pas besoin d’habiter dans les montagnes ou au Québec pour obtenir ces conditions.

A l’automne, semez vos graines en suivant la méthode générique présentée dans la première partie de cet article. Ensuite :

  • Placez le bac contre le mur nord de votre maison, là où il fera le plus froid ;
  • Ne placez pas le bac en dessous d’un écoulement d’eau (juste en dessous d’une toiture sans gouttière par exemple) ;
  • Méfiez vous des fortes pluies. Je préfère laisser mes graines à l’abri et les arroser de temps en temps plutôt que de risquer une inondation ;
  • Si possible, placez le bac sur une table ou un muret pour décourager certains petits animaux de venir fouiner dans le bac ;
  • Mettez un morceau de grillage fin au dessus du bac afin d’éviter l’arrivée des oiseaux.

Ensuite, laissez faire le temps, tout simplement. Si l’hiver est relativement sec, humidifiez le terreau de temps en temps.

L’avantage de cette méthode : une fois que vous avez tout mis en place, il suffit d’attendre patiemment en vaporisant de temps en temps.

L’inconvénient est qu’il y a plus de préparations en amont, mais moins de travail en aval à l’arrivée du printemps.

La stratification à froid en extérieur et en boîte enterrée

Cette stratification à froid en boîte fermée enterrée est une variante de la précédente. Vous pouvez aussi l’utiliser si vous avez les mêmes conditions hivernales (4 à 6 semaines de froid, avec une quinzaine de jours de températures en dessous de 0°C, pas forcément consécutifs).

A l’automne, faites la chose suivante :

  • Tamisez une petite quantité de sable, disons une tasse ;
  • Humidifiez le sable avec un peu d’eau. Le sable ne doit pas être trempé et dégoulinant. Il doit être juste humide ;
  • Mélangez les graines au sable ;
  • Placez le mélange dans une boite en plastique hermétique ;
  • Enterrez la boite à 20 cm de profondeur au pied du mur nord de votre maison.

Ensuite, il n’y a plus rien à faire jusqu’au printemps, on laisse faire le cycle des températures.

Déterrez la boite au mois d’avril. Ne l’oubliez pas ! Mettez le mélange sable-graines dans une passoire ou un tamis assez fin pour laisser passer le sable mais retenir les graines, et passez sous l’eau.

Vous pouvez aussi étaler le mélange sur une table et récupérer les graines à la main (un peu plus fastidieux).

Ensuite, plantez en suivant la méthode présentée dans la première partie de cet article.

La stratification à froid dans votre réfrigérateur

Le bon vieux réfrigérateur peut s’avérer très utile pour faire germer les graines. Au mois de février, faites la chose suivante :

  • Tamisez une petite quantité de sable, disons une tasse ;
  • Humidifiez le sable avec un peu d’eau. Le sable ne doit pas être trempé et dégoulinant. Il doit être juste humide ;
  • Mélangez les graines au sable ;
  • Placez le mélange dans un sac, un bocal ou une boite en plastique hermétique et placez le mélange dans le bac à légumes du frigo ;
  • Laissez les graines au frigo pendant 2 mois.

Vérifiez de temps en temps (une fois par semaine) que les graines ne sont pas en train de germer. Si certaines ont germées (ce qui est plutôt rare), vous pouvez essayer de les récupérer pour les planter immédiatement dans un godet, à laisser sur le rebord d’une fenêtre.

Sortez la boite du frigo au mois d’avril. Ne l’oubliez pas ! Mettez le mélange sable-graines dans une passoire ou un tamis assez fin pour laisser passer le sable mais retenir les graines, et passez sous l’eau.

Vous pouvez aussi étaler le mélange sur une table et récupérer les graines à la main (un peu plus fastidieux).

Ensuite, plantez en suivant la méthode présentée dans la première partie de cet article.


Faire germer par scarification de la graine

Ici, la germination se heurte à un autre problème. Certaines graines sont en effet protégées par des couches extérieures imperméables qui sont très solides. Si l’eau n’arrive pas à pénétrer à l’intérieur de la graine, le processus de réveil ne peut pas être déclenché.

Les plantes médicinales de la famille des fabacées par exemple (réglisse, baptisia tinctoria, astragalus membranaceus) en font partie. D’autres familles nécessitent aussi cette scarification.

Le but de la scarification est d’endommager légèrement la pellicule externe de la graine afin de laisser passer l’eau. L’idéal est d’exposer légèrement à l’air l’endosperme, c’est à dire la chair blanche qui se trouve juste sous la peau de la graine.

Il faudra scarifier loin de la « hile » de la graine. Wikipedia nous rappelle que la hile est la « cicatrice que porte la graine au point où elle était attachée à la plante (dans la gousse, la capsule) dont elle est issue ». Ceci peut se repérer facilement à la loupe, la hile est la petite partie en relief, souvent d’une couleur différente, et représente le « nombril » de la graine, la partie où la graine était attachée à la plante mère.

En général, on peut voir si les graines ont besoin d’être scarifiées en faisant le test suivant : verser les graines dans un verre d’eau et laisser reposer une nuit. Le lendemain, si la graine a gonflé, c’est qu’elle n’a pas besoin d’être scarifiée. Si elle n’a pas gonflé et est toujours dure, elle aura besoin de l’être.

Maintenant voyons comment se fait la scarification.

La scarification individuelle (Graine par graine)

Lorsque la graine est assez grosse, elle peut être scarifiée individuellement, ce qui permet de mieux contrôler le processus.

Méthode 1 :

  • Munissez-vous d’une pince à épiler, d’une feuille de papier verre de grain relativement fin que vous trouvez dans les magasins de bricolage, et surtout de patience.
  • Maintenez la graine dans la pince à épiler en exposant le coté opposé au hile.
  • Frottez doucement la graine sur le papier verre. Arrêtez l’opération lorsque la chair blanche sous la peau extérieure commence à apparaître. Utilisez une loupe si nécessaire.

Méthode 2 :

  • Munissez-vous d’une pince à épiler et d’un cutter à lame neuve.
  • Maintenez la graine dans la pince à épiler en exposant le coté opposé au hile.
  • Entaillez légèrement la graine à l’aide du cutter, ce qui n’est pas si facile que cela. Vérifiez l’entaille à la loupe si nécessaire. Une très légère entaille qui expose juste la partie blanche (endosperme) est suffisante pour faire germer les graines.

Voici une vidéo pour démontrer comment scarifier une grosse graine au cutter (ici Hibiscus sabdariffa).

Je préfère personnellement la méthode 1 que je trouve plus facile à exécuter.

Mais comment faire lorsque les graines sont trop petites pour les prendre une par une ?

La scarification « collective » au papier verre

Lorsque les graines sont trop petites, il est trop difficile voire impossible de les scarifier une à une. On les scarifie donc d’une manière collective.

  • Versez une quantité de graines sur une première feuille de papier verre (grain fin), le tout posé sur une surface plane ;
  • Agrafez une deuxième feuille de papier verre (grain fin) sur un morceau de bois plat ;
  • Commencez à frotter doucement les graines prises en sandwich, en faisant des petits mouvements circulaires ;
  • Observez régulièrement à la loupe et faites de votre mieux pour ne pas trop endommager les petites graines.

Ce n’est certes pas une méthode précise, et certaines graines pourront se casser. Ce n’est pas bien grave, car une majorité sera stratifiée d’une manière suffisante pour faire germer les graines.

La scarification a-t-elle été faite correctement ? Trempage et test final

Après avoir scarifié toutes vos graines, versez les dans un verre d’eau et laissez les reposer une nuit. Le lendemain, plantez les graines qui ont gonflé, et répétez l’opération pour les autres.


Faire germer en exposant à la lumière

Certaines graines ont d’autres exigences. La lumière du soleil est parfois nécessaire pour les faire germer. Les graines ayant besoin de lumière sont en général très petites (millepertuis, lobélia, bouillon blanc par exemple).

Lorsque vos graines ont besoin de lumière pour germer, voici la technique à suivre :

  • Préparez votre bac de plantation en suivant la méthode exposée dans la première partie de cet article. Tassez fermement la surface du bac ;
  • Mélangez les graines dans un peu de sable. Préparez une grosse pincée de sable tamisé dans un bol, ajoutez vos graines, mélangez et saupoudrez la surface du bac ;
  • Tassez fermement la surface du bac à l’aide d’une petite taloche, d’une pierre bien plate ou d’un morceau de planche ;
  • Placez le bac à un endroit où il sera exposé à la lumière naturelle une partie de la journée.
  • Humidifiez régulièrement.

Le traitement par le feu pour faire germer

Encore une particularité : certaines plantes germent beaucoup mieux après un incendie. Pourquoi ? Probablement parce que la plante a su tirer avantage de cette opportunité unique, profitant d’un environnement sans concurrence et riche en fertilisants naturels : les cendres.

Dans le milieu naturel, un bon feu est nécessaire pour faire germer les graines de sauge blanche (Salvia apiana) par exemple. Rassurez-vous, peu de graines nécessitent ce traitement là.

Lorsque ce traitement est nécessaire, voici la méthode à suivre :

  • Procurez-vous un contenant métallique, une vieille bassine par exemple, ou une grosse boite à biscuits ;
  • Remplissez la boite de terreau, et enterrez les graines à environ 7 à 8 mm de profondeur (afin de les protéger du feu tout en les exposant de près à la chaleur) ;
  • Utilisez une petite quantité de brindilles et de bois blanc pour faire un feu au dessus des graines ;
  • Laissez refroidir ;
  • Arrosez au travers des cendres froides pendant les semaines qui suivent.

Prenez vos précautions et gardez un tuyau d’eau à portée au cas où votre petit feu s’éparpille hors de la boite.


La germination par la chaleur

Comme chez l’être humain, certaines graines préfèrent le froid, et d’autres ont plutôt besoin de chaud. Nous avons vu la stratification à froid un peu plus haut. Nous voyons ici la situation inverse : la germination par la chaleur.

Pour faire germer les graines de passiflore (Passiflora incarnata) par exemple, il faut donner à la graine une chaleur relativement constante. Il en est de même pour faire germer les graines de stévia (Stevia rebaudiana).

La première méthode consiste à acheter un tapis chauffant spécial germination. On trouve des tapis relativement bon marché sur internet autours des 50€. Certains utilisent aussi des lampes chauffantes de germination. Mais il y a plus simple.

J’obtiens de très bons résultats en plantant en serre et en attendant les mois les plus chauds du printemps – fin mai à début juin. Les nuits sont devenues plus douces et les journées sont relativement chaudes dans la serre (voire parfois très chaudes).

Faute d’avoir une serre de jardin, vous pouvez vous procurer une petite serre portable. Pour le jardinier, la serre devient très vite indispensable, quelle que soit sa taille. Vous ne regretterez pas votre petit investissement.

Et bien sûr, faute de serre portable, il reste le rebord ensoleillé de la fenêtre, en ne semant pas trop tôt au printemps pour éviter les grosses variations de température au travers de la fenêtre.